Compréhension des enjeux de la Zac de la Courrouze
Le projet urbain de Paola Vigano, Bernardo Secchi et Charles Dard se caractérise par des intentions très précises, très écrites à toutes les échelles : plan urbain, grand paysage, petit paysage, voies, blocs, îlots, jardins, morphologies, typologies, programmes, mutualisations, imbrications, etc…Il convoque plus particulièrement à nos yeux des notions de mémoire et d’héritage. Cela se caractérise par la volonté affirmée de s’inscrire dans la continuité du paysage en présence. Cette continuité s’écarte du risque de la simple répétition d’une forme existante, par de multiples précisions et variations qui déterminent le potentiel de singularité et de richesse de chaque ilôt. Le CPEU du lot ES3 nous guide sur cet ilôt qui préexiste presque dans ses intentions urbaines. Notre rôle d’architectes n’est plus tout a fait l’invention d’un projet entièrement neuf, mais déjà une sorte de projet de transformation d’un déjà-là.
Une transformation qui serait toutefois affranchie d’une bonne partie des contraintes habituelles liées à la matière. Pour nous, l’appropriation du projet urbain pour le lot ES3 passe par cette acceptation. Notre rôle consiste alors à emboîter le pas de ce premier acte pour en proposer les continuités, mais aussi des variations.
Héritage du site :
La zone Euroshelter présente des traces visibles de son activité industrielle. Les hangars du site sont par ailleurs présents sur site. Nous trouvons également un muret accompagnant le parcellaire et les accès en profondeur dans les ilôts. Ce muret de soutènement, fait de schiste teinté, vient souligner une rupture de terrain, une topographie. Cet HERITAGE du site, cette topographie est un élément remarquable de la ZAC, et particulièrement singulier sur la zone EuroShelter. L’héritage qui ponctue la zone urbaine est autant guidée par le paysage, que par le cycle de l’eau ou la volonté d’assumer une certaine densité, une certaine hauteur afin de dégager du sol au profit des usages.
Volumétries :
La Zac de la Courrouze propose un agencement de volumes fragmentées, assemblages de plots et de volumes bas étirés. Ces assemblages créent un épanelage très riche, un rapport à la densité mesurée par une attention forte au rapport au sol, au piéton. Ces ruptures de hauteur créent des variations permettant de laisser le regard s’enfuir entre les bâtiments, vers le paysage. Ces ilôts ouverts, à la vue et à la traversée permettent de ressentir très fortement le paysage en tout point de la ZAC.
Stabilité et minéralité :
Ce que nous apprend la visite de la ZAC et les documents en notre possession, c’est qu’il s’agit notamment d’une morceau de ville minéral, stable et pérenne. Les façades sont tramées, les bâtiments sont ancrés au sol et expriment une certaine pesanteur.
Pour autant les percements sont généreux, volonté de faire rentrer le paysage dans le logement et d’offrir un confort maximum par la qualité lumineuse. L’expression des façades exprimant une rythmique particulière, les espaces extérieures deviennent des morceaux choisis de cette trame, des creux ou des extrusions insérés dans un guide structurel. Le choix des expressions minérales, béton teinté, briques, enduits confère à la ZAC une recherche d’unité par le matériau de façade et des variations dosées par le jeu subtil des teintes.
Travail du sol et des franges :
L’ilôt ES3 trouve sa place en bout de bande, entre l’opération ES2 dessinée par Philippe Prost et les hangars industriels du site. Cette position, cette finalité, est amplifiée par la présence d’une placette publique, par une situation topographique particulière ne plateau, en surplomb et par le parc qui longe l’ilôt et le relie au reste de la ZAC.
Cette placette permet aux ilôts d’adresser des façades nobles sur un espace libéré des voitures. Celles-ci sont cantonnées au nord de l’ilôt. Le travail de socle entre alors en jeu. Par la création d’un parking semi enterré, nous imaginons offrir une certaine initimité aux logements sur rue et place. A cela s’ajoute une mise à distance physique par la création de jardin sur dalles proposés dans la fiche de lot sur la place. Ces élements permettent d’assurer l’intimité de ces logements de l’entresol. Le parking semi-enterré permet, en plus de l’intimité des logements de l’entresol, de créer des halls traversants libéré en hauteur. Ils s’ouvrent donc sur 1,5 hauteur pour offrir des vues traversantes sur le paysage.
Fragmenter les volumes :
Dans le but de travailler sur la qualité du logement nous pensons intéressant de nous questionner sur la création d’une faille, d’un vide entre les deux volumes de la fiche de lot. Nous menons également une recherche d’homogénéité matérielle et colorimétrique avec les constructions avoisinantes. En effet, la volonté affiché de convoquer des teintes se rapprochant du schiste géologique du site amplifie le caractère situé de cette ZAC et cet ilot ES3 dans la ZAC. Nous souscrivons à l’idée de trouver la bonne variation, autant en résonnance avec les autres bâtiments qu’en complément pour trouver l’apaisement entre les différents vocabulaires.
Les lieux du commun :
En travaillant la volumétrie du projet, il nous apparaît que le parking peut tenir sous l’emprise bâti. A ce titre, la cour, le jardin au sol de cet ilôt peut donc rester entièrement en pleine terre. Il permet dès lors de porter des usages communs autour d’un jardin partagé et nourricier. D’autre part la toiture du volume en R+4 sera végétalisée et pourrait devenir accessible. Les halls, les locaux vélos et les boîtes aux lettres seront également des lieux de rencontre des habitants et feront l’objet d’attention particulière, à une échelle modeste et domestique afin de proposer des lieux de pause et de convivialité.
Photos de site : Kevin Pion et Matthieu Bergeret
Collages : Fabien Bussière
Illustrations : Matthieu Bergeret
Maquette : Lemoal & Lemoal
Perspectives : Lotoarchilab